La Bretagne et notamment le Finistère abondent de richesses culturelles, eu égard à leur longue histoire. C’est aussi (et surtout peut-être) vrai grâce à l’important patrimoine architectural religieux qu’il soit extérieur (ossuaires, enclos paroissiaux, calvaires, etc), ou intérieur. Mardi 18 mars, à l’Espace Culturel de Saint-Renan, Gusti Hervé, Président de l’Association SPREV (Sauvegarde du Patrimoine Religieux en vie) a longuement évoqué l’histoire des jubés et chancels qui ornent encore de nombreuses églises (et surtout chapelles) de notre belle région...

Ils ont fleuri un peu partout. En s’appuyant au départ sur la structure des synagogues juives (d’où on lisait la “tora”) et encore avant sur les temples égyptiens. On en trouve bien sûr en Italie et à Rome (La basilique Saint-Clément, l’église Santa Maria in Cosmedin, etc) ainsi que dans d’autres pays (Abbaye de Canterburry par exemple, Allemagne). Ils ont aussi "poussé" en France hors de notre région (Bourges, Albi avec un splendide jubé en surplomb datant du 16e siècle, Chartres, Troyes avec une véritable dentelle de pierres en l’église Sainte-Madeleine, Le Mans, etc)

Et en Bretagne ? « Nous en comptons encore une vingtaine. Ils ont tous ou presque trois éléments essentiels plus ou moins développés et décorés. A l’exception de celui du Folgoët qui est en pierre, ils sont tous en bois. Les trois structures ? Une tribune (avec un escalier dans un pilier) pour la lecture et le chant, une clôture, appelée "cancel" toujours très décorée et une poutre de gloire avec la crucifixion et les statues de Marie et de Jean. Certaines poutres peuvent être beaucoup plus riches en sujets divers avec la représentation de plusieurs autres apôtres par exemple. »

Ces jubés, apparus au début du second millénaire (à l’abbatiale Saint-Maurice dès le 9e siècle) avaient une finalité évidente. Ils se situaient au sein de l’église bien sûr mais séparaient celle-ci. D’un côté la nef avec les fidèles "ordinaires", de l’autre le chœur avec le clergé, les militaires, les notables...
Une organisation féodale...Un peu tout de même une certaine ségrégation !

La "révolution" du Concile de Trente

Depuis, plusieurs de ces structures ornementales ont disparu. Avec le souhait affirmé du Concile de Trente (de 1545 à 1643) _ à l’origine du schisme entre protestants et catholiques _ de mieux voir le déroulement de la messe. Alors que jusque là, le "peuple" était confiné derrière le jubé et son chancel.
« du coup de nombreux monuments ont été détruits ou réutilisés pour des tribunes d’orgue à Lamballe et à Rochefort en Terre par exemple. » Mais cette suppression des séparations ne concernaient pas les chapelles.
Du coup, de nombreux monuments récents représentent de véritables œuvres d’art avec des sujets vivants et parfois naïfs : la fable du renard et des poules, le voleur de pommes, l’ivrognerie, la luxure, le basilic et le serpent. Le plus bel ouvrage se situe à la chapelle Saint-Fiacre au Faouët (56). A Plélauff, on retrouve aussi la représentation des péchés capitaux.. Le chancel le plus riche se situe, quant à lui, à l’église Saint-Herbot (Plonévez du Faou).
Toutes ces représentations démontrent à l’évidence la prospérité de l’Eglise catholique même si sur les 110 jubés dénombrés à l’époque, seuls en subsistent 20-21. Tous méritent le détour...

Ces jubés disparus dans le but essentiel, répétons-le, de ne pas couper en deux une église à l’issue de ce Concile de Trente laissèrent la place à une autre structure afin de créer un espace privilégié et plus élevé pour prêcher la bonne parole. C’est ainsi que naquirent les chaires (certaines de grande beauté) même si dans beaucoup de lieux de culture, les lectures, les prônes se déroulent désormais du chœur lui-même.

Ce dépouillement, signe des temps sans doute, n’occulte en rien les merveilles du passé à l’intérieur et à l’extérieur des offices religieux.

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